Parce que la lecture est une passion qui se partage, il me fallait un univers bien à moi. Des livres, des Bandes dessinées, de jolies découvertes et quelques déceptions. Bienvenus dans la bibliothèque de Marion.
Léa a 38 ans. Elle est à la fois danseuse et chorégraphe. Plongée dans cet univers depuis sa tendre enfance, la danse représente pour Léa à la fois une passion et « une nécessité ». Chaque jour, elle danse à corps perdu afin de se retrouver, afin de garder un certain équilibre. Cependant, c’est un semblant d’équilibre car elle perçoit un vide immense, une inquiétude sans fin… Et puis surtout, quelque chose l’empêche profondément de s’investir dans chacune de ses relations amoureuses, et particulièrement avec Bruno, son petit ami du moment. C’est son amour, mais elle n’arrive pas à s’abandonner à lui, elle n’arrive pas à l’aimer réellement. Lui, il est peintre de l’immobile. Il réalise des portraits, des nus. Léa le sait : Bruno souhaiterait profondément qu’elle pose un jour pour lui… Mais quelque chose l’en empêche. Un après-midi, après avoir succombé à quelques verres de vins-chauds, Léa se sent prête à poser pour Bruno. Mais rien ne se passe comme prévu… Prise par l’angoisse, elle s’enfuit et Bruno, impuissant, ne la retient pas… Elle va alors chercher refuge chez sa mère, Romilda, qu’elle a appelée quelques heures plus tôt apprenant la tempête qui allait s’abattre sur son petit village. La mère qui s’est toujours tu, avoue alors à sa fille qu’il faut qu’elle lui parle… Romilda raconte alors comment elle est devenue Suzanne pendant la guerre dans cette maison close d’Italie pour Jean-Baptiste, le français pour qui elle a tout quitté…
Il y a quelques mois de cela, je tombais sous le charme de la douce écriture de Jeanne Benameur. Cette découverte m’avait émue, bouleversée… Je savais que cette rencontre ne serait pas la dernière (et là vos deux belles sœurs vous glissent au pied du sapin un livre de Jeanne Benameur…). Je crois même que j’ai pensé pendant un court instant que cette auteure était faite pour moi. Ses mots m’avaient transportée…
A nouveau, je suis tombée sous le charme de cette écriture ciselée, criante, envoûtante. Les phrases sont courtes, très courtes, les mots terriblement bien choisis. Il ressort de ces pages une poésie dont seule Jeanne Benameur a le secret. J’ai pris le temps de lire ce roman, pages après pages, sans me précipiter… Cinq petites pages par-ci, dix petites pages par-là… Je ne voulais surtout pas gâcher le plaisir de cette lecture, le plaisir immense de ré-ouvrir ce roman et de plonger dans un univers lointain.
Le livre aborde en parallèle onze tableaux qui nous permettent de connaître la vie actuelle de Léa, de Bruno, et le passé de Romilda. L’histoire de Léa, de Romilda, cette histoire de famille en somme, m’a fascinée, m’a transportée… Au premier abord, j’ai eu l’impression d’assister au désenchantement d’une famille perdue, sans grand amour. Les rapports de Léa et Romilda m’ont semblés si éloignés, si froids… Et puis, plus j’avançais dans ma lecture, plus je comprenais pourquoi cette impression-là était si tenace… Au final, je me suis aperçue que ma première impression était fausse, archi-fausse… Laver les ombres, c’est en fait une grande histoire d’amour entre deux êtres perdus dans la foule. C’est aussi un livre qui aborde le thème délicat de la vérité… Jusqu’où peut-on dire la vérité ? Est-ce qu’une fille peut tout apprendre de sa mère ? Est-ce que la parole permet de se reconstruire ?
En bref
Jeanne Benameur construit avec talent l’histoire de trois personnages dont la parole est devenue outil indispensable pour laver les maux, les douleurs qui les habitent… Un véritable coup de cœur… Et terrible hâte de découvrir un nouveau roman de cette auteure…
« Bruno, c’est son océan.
Si un jour il s’écarte d’elle alors il n’y aura plus rien pour relier son corps au monde et elle sera devenue une île. Inabordable. »
« Aimer, c’est juste accorder la lumière à la solitude.
Et c’est immense. »
Babel, 157 pages, 2010